Extrait du journal du commandant Jacob Hardy, pilote, Ares One
—
Tout le monde s’interroge au sujet des mots.
La vérité, c’est que je ne suis pas poète. Ares One ne laisse pas beaucoup de place pour autre chose que les compétences pures. Au moment de pénétrer dans l’atmosphère, nous avions atteint une température dangereusement élevée. À travers le chaos causé par un épaississement de l’air et la turbulence qui perturbait notre visuel de la cible à atteindre, nous avons essayé de trouver un site sur lequel nous poser. À cause d’un délai de vingt minutes, le temps nécessaire à la lumière pour faire son aller-retour entre nous et la Terre, nous ne pouvions compter que sur nous-mêmes.
Quand le moteur numéro 3 lâcha au cours de la seconde correction de cap, j’ai cru que la situation était catastrophique.
Mais Qiao nous mena à bon port. Mihaylova nous mena à bon port. Pour ma part, je ne faisais que piloter le vaisseau.
Le véhicule d’exploration Ares One avait été construit pour de faibles vents et de la poussière de glace. Quand nous avons enfin pénétré l’atmosphère, une tempête faisait rage : le souffle de Dieu, un déferlement de changements climatiques, s’abattait violemment sur la structure. Par trois fois, nous avions dû changer de site d’amerrissage. Il fallait nous poser. Je désactivai le pilote automatique, repris les commandes et commençait les manœuvres de descente, me fiant uniquement à mon instinct et à mes réflexes.
Après avoir passé en revue les listes de contrôle, nous revêtîmes nos habits protecteurs et sortîmes.
Nous avions un script, c’est vrai. Il est vrai aussi que je ne l’ai pas suivi. J’ai posé le pied sur le sol et fis la plus célèbre gaffe de l’histoire de l’homme. Je dis la première chose qui me passa par l’esprit : un avertissement aux autres.
« Le vent se lève. »
Sur le coup, je ne pensais pas à écrire l’histoire. Je voulais simplement les mettre en garde.