Confession d’espoir, 1ère partie

Légende 2 sur 12 de la série Les Dernières Paroles de Dredgen Yor
 

Le choix me hante.

Il n’était pas raisonné. J’ai laissé mes émotions s’emparer de moi. Les Déchus étaient partis. Les quelques survivants étaient blottis dans une caverne sombre, réprimant leurs lourdes respirations rapides et étouffant leurs sanglots.

Lorsque je les ai trouvés, il y a de cela de nombreuses nuits, j’ai également trouvé un nouvel objectif pour moi. J’avais parcouru ces mondes morts ou mourants depuis plus longtemps que je n’ose m’en souvenir à la recherche d’une étincelle digne d’être allumée.

Avec le temps, je m’étais lassé, mais avec cette petite bande de survivants, j’avais retrouvé espoir. Si je n’arrivais pas à trouver une âme perdue digne d’être touchée par la Lumière, alors je trouverais un autre moyen, à plus petite échelle, de me rendre utile. Je mènerais ce petit rassemblement d’hommes, de femmes et d’enfants désespérés au sanctuaire en pleine croissance sous le Voyageur.

Si je ne pouvais trouver de héros pour défier les Ténèbres, je serais un guide pour ceux nécessitant le salut.

Il a fallu du temps pour gagner leur confiance. J’étais étrange, différent. Ils ont pensé que j’étais un ange. Je leur ai dit que ce n’était pas le cas. Ils m’ont appelé Tiānshǐ. Je n’avais rien contre.

L’enfant était fasciné par moi. Il était trop jeune pour parler, et encore plus pour comprendre, mais sa présence était à la fois un fardeau et une bénédiction. Ses parents faisaient tout leur possible pour s’occuper de lui, le protéger avec l’aide, le réconfort et les soins de leurs compagnons de voyage. Ils avaient été des étrangers les uns pour les autres, mais ils étaient à présent liés par un lien plus profond que celui du sang. Ils partageaient l’expérience de cette nouvelle vie après la fin du monde.

Ce jour-là, dans cette caverne, transie de peur à cause du rugissement du Skiff déchu qui s’éloignait au-delà des cimes, la mère gémit. C’était un son que je n’avais jamais entendu, et que j’espère ne plus entendre à nouveau.

Cette douleur. Cette peine.

Chagrin. Souffrance. Perte.

Son cri s’est propagé dans la forêt. Son mari, en pleurs et sur le point de s’effondrer, la tenait dans ses bras.

Et dans ses bras à elle, l’enfant qui venait de mourir.

Les autres essayaient de les calmer, de peur que les Déchus ne reviennent. L’attaque avait été rapide et brutale : vingt morts et seulement neuf survivants, ici dans cette caverne. J’ai regardé vers les arbres, anxieux et apeuré.

La douleur de la mère remplissait l’espace entre chaque tronc. Je me suis retourné vers elle, et je l’ai vu pour la première fois : l’étincelle de l’enfant.

Faible, mais bel et bien présente.

Je ne pouvais m’occuper de ce petit enfant. Ceux qui étaient choisis étaient des champions. Cet enfant était si petit, si frêle. De quel dévouement avait-il fait preuve ? Quel courage ? Qu’avait-il sacrifié ? Mais une pensée me traversa…

N’était-ce pas mon objectif le plus pur de faire naître l’espoir ? Tous les héros relevés ne se battaient pas pour eux-mêmes, mais pour l’humanité tout entière. Si sauver une vie, si corriger cette terrible perte, n’était pas une cause juste… alors laquelle l’était ?

J’ai observé la mère alors qu’elle pleurait.

J’ai senti mon expansion. J’ai senti la Lumière me composant s’intensifier. D’une certaine manière, je ne pouvais choisir. C’était comme si quelque chose avait atteint l’intérieur de moi et basculé un interrupteur. Un rayon s’échappa de mon noyau et baigna le corps meurtri de l’enfant dans la Lumière.

Une seconde passa…

Et il se mit à crier. Tous se turent. Le don du Voyageur avait été donné. Un enfant était revenu. Et avec lui, le début de la fin de mon voyage.

Avais-je fait ce qu’il fallait ? L’enfant grandirait-il et atteindrait-il son pic de croissance physique ? Serait-il capable, comme tous ceux qui étaient revenus, d’affronter les guerres à venir ?

Puis une pensée me traversa, une que je n’avais encore jamais envisagée : la mort était peut-être préférable.

Avais-je sauvé cet enfant, ou l’avais-je condamné ?

Alors que ses cris résonnaient, tous les survivants se regardaient, hébétés. Leur silence était empreint de joie, d’émerveillement.

J’ai regardé vers lui, et la fierté a commencé à m’envahir. J’avais fait ce qu’il fallait.

Tout ceci ne s’était passé que quelques mois auparavant, et pourtant cela semblait si lointain.

Désormais, les Déchus sont de retour et il nous faut courir. J’ai bien peur que la promesse d’un don ne soit pas suffisante pour nous sauver de la lame d’un pirate.

– Fragment de la dernière transmission d’un Spectre anonyme

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Références