Autrefois.
Palamon était en cendres.
Je n’étais qu’un gamin, la morve au nez et le visage marqué par la suie et la tristesse.
Je pensais que Jaren, le sauveur de Palamon qui était mon ami et notre Gardien, nous protègerait et pourrait toujours nous sauver.
Quelle naïveté !
Jaren et les autres, même s’ils étaient peu nombreux, étaient nos meilleurs chasseurs et les plus courageux parmi nous. Ils étaient partis trois soleils plus tôt, suivant la piste de Déchus après que les bandits aient semé la pagaille.
L’inconnu arriva le jour suivant. Il ne parlait que très rarement. Il a pris une de nos chambres. Il a profité de notre hospitalité.
Il m’intriguait, tout comme Jaren m’avait intrigué lorsqu’il était arrivé la première fois. L’inconnu était froid, distant. Il me semblait brisé. Cependant, je n’avais pas peur. Pas encore, du moins.
Lorsque j’étais enfant, les seuls monstres que je connaissais ressemblaient à des hommes, mails ils étaient différents. Ils avaient quatre bras et se comportaient en sauvages.
L’inconnu était poli, lui, mais grave.
Je l’ai donc pris pour un homme triste et blessé, et c’est bien là ce qu’il était. Mais à l’époque, je ne comprenais pas à quel point cela pouvait rendre un homme dangereux.
Comme il l’avait fait avec Jaren, père essaya de ne pas me laisser me rapprocher de l’inconnu.
Mais cela ne servit à rien.
Quand je vis sa silhouette se dessiner, je fus immobilisé par la peur. Il me surplombait, de toute sa contenance obscurcie. Il me regardait comme s’il pouvait voir à l’intérieur de moi-même, à travers moi. Il sourit. Je sentis mes jambes se dérober et me pensai complètement perdu.
Puis, il se retourna et partit, sans même se retourner.
Il ne laissa dans son sillage que des ruines, et un petit garçon terrifié et inconsolable.
Et depuis ce jour-là, je suis parti en chasse de l’ombre de cet inconnu.