« Par chance, nous nous sommes rencontrés sur un… terrain neutre. Il ne m’a pas donné son nom, il s’est fait appeler « Vagabond ». Je lui ai dit que dans ce cas, il pouvait m’appeler « mon pote ». Ça l’a fait rire, il s’est détendu. Il m’a parlé de tout un tas d’endroits où il avait été, de ce qu’il cherchait à faire. Il m’a même renseigné sur l’emplacement d’un vieil ami. Je me demande encore s’il sait qui je suis vraiment.
Il m’a dit qu’il avait quitté le système dès qu’il avait été ressuscité. Pas immédiatement, bien sûr. Il avait fallu qu’il retrouve ses repères, qu’il trouve un vaisseau, l’équipe et le fasse voler. Mais dès que tout ceci avait été prêt, il était parti. « Attiré par les confins », disait-il. Je peux le comprendre.
Il affirme avoir vu le côté sombre de Jupiter, avoir été dans les mines centrales de Saturne. Il a fait allusion à des mythes ancestraux dont personne n’a jamais entendu parler : le Nœud luvial, les Gouffres instables sous Elios, le quatrième tombeau de Nezarec. Il a parlé pendant des heures des idoles du Sul inférieur, du trésor du Premier Exode, du moteur solaire des Six étoiles mortes.
Je pense qu’il ment beaucoup, mais il possède des reliques et des gravures. Il possède des matériaux qui ne proviennent pas de ce système : des métaux étranges, des flammes d’obsidienne, des moteurs de pensée, des gâteaux du néant comestibles et un truc empaillé qui ressemble à la fusion biologique d’un lapin et d’un céphalopode. Il conserve tout ça et les appelle ses « possessions ».
S’il s’en sert pour se vanter, l’effet est réussi. Mais dans quel but ? Le désordre engendré dans son vaisseau par toutes ces choses n’est rien comparé à ce qu’il transporte : une énorme masse noire de rien, une chose encore jamais vue.
Il appelle ça une « relique », mais c’est bien plus que ça. Mais je ne sais pas exactement quoi. Il dit qu’il est allé le chercher aussi loin qu’il n’avait jamais été. Que cela provient d’un endroit si froid qu’il éteint votre Lumière. Je lui ai demandé si c’était de facture vex ou de la Ruche. Mais il est resté très évasif. Il a affirmé que non, que c’était « autre chose » et que c’était très puissant… peut-être.
Voilà sa manière de décrire la chose : « peut-être ».
Je lui ai demandé pourquoi diable rapporter une telle chose dans le système intérieur, car les « peut-être » sont souvent source de problème. Mais il a réponse à tout. Il a répondu…
« Frère… c’est dans les peut-être que se trouvent les véritables trésors. »
Il a compris que cette réponse ne me satisfaisait pas, mais je sentais qu’il ne mentait pas. Ce truc était « autre chose », c’est certain, et les analyses du Spectre battaient tous les records. Mais elles étaient abstraites, avec des caractéristiques totalement inconnues.
Je n’étais pas à l’aise, mais le Vagabond, avec son charme naturel et ses manières simples, m’a demandé si je connaissais un homme vêtu de noir appelé Callum.
Il cherchait bien évidemment à détourner la conversation, mais il était suffisamment chanceux, ou intelligent, pour choisir un sujet qui m’intéresse, chose que je respecte. »
– Observations d’un Renégat concernant un Vagabond